Tu m'as souri, un jour. Ce jour-là j'ai cru que c'était fini, j'y ai vraiment cru, tu sais. Il était beau, ton sourire. Je n'aimais pas te voir triste.
Mais je suis toujours triste.
C'est ce que tu m'as murmuré, un grand sourire aux lèvres. Tu as lentement enfoncé cette phrase dans mon cœur, méthodiquement, aussi douloureuse qu'une lame affûtée. Je te détestais parfois, tu sais. Je te détestais d'aller mal. Je te détestais de ne plus savoir être heureux. J'avais envie de te frapper, te frapper jusqu'à ce que tu n'aies plus mal, jusqu'à ce que tu arrêtes de pleurer.
Un mort ne pleure plus.
J'imagine encore ta voix me répéter ces mots. Elle est toujours floue, déformée. Tu pensais que tu pourrais me faire comprendre. Tu pensais que je finirais par accepter ta fatalité. Moi aussi, je croyais que tu comprendrais, tu sais. Je me disais que tu finirais par attraper ma main. Mes doigts se sont refermés sur le vide.
Oublie. Tu n'es pas assez forte pour me sauver.
Tu avais cette manière de dire que tu ne m'en voulais pas, une manière qui hurlait dans ma tête que tout était de ma faute. C'était pas de ma faute, tu sais. Je méritais pas ça. Tu as été injuste.
Je veux vraiment t'épargner, toi.
Tu m'as toujours assuré que tu ne voulais pas me faire de mal. Que les autres, tu avais voulu les faire souffrir, mais pas moi. Tu leur avais dit ça, avant, à eux aussi ? Est-ce que tu y croyais, à ta folie ? Tu croyais vraiment que ça pouvait tout changer ?
J'ai juste besoin que tu m'aides.
Je pouvais pas ! J'ai essayé, je te promets... Je pouvais pas, je pouvais pas... Désolée...
Ne t'inquiète pas, c'est pas grave.
Je crois que tu mentais, tu sais. Je crois que tu me détestais au fond. Moi aussi, je te mentais, sans doute. Je te mentais en disant que je voulais ? Je te mens en disant que j'ai essayé ? On était tous les deux pendus à nos mensonges, à notre folie. Mais on ne partageait pas la même corde. Tu avais conscience de ce que tu disais ? Tu avais cet air innocent, comme un enfant qui demande ce que maman fait dans le ciel. Mais maman est morte, tu sais. Tu le savais ? Tu savais que maman ne viendrait plus jamais dire bonne nuit ?
Tu dramatises tout. Tu espères encore. Je t'ai déjà dit de fuir l'espoir.
J'espérais, oui. Égoïstement, j'espérais rester innocente de ce crime dont tu m'accablais en le revendiquant. Tu as taché mes mains. Tu les as vraiment tachées ? Je ne sais pas, j'ai fermé les yeux. Tu me croyais résignée, j'étais lâche.
Oublie.
J'espère que tu m'as menti, tu sais. J'espère que tu voulais seulement me voir m'effondrer. J'espère que tu es parti torturer d'autres âmes trop pleines de ce sale espoir que tu fuyais. J'espère n'avoir jamais la réponse, ce spectre qui plane et me terrorise. J'espère oublier, puisque tu me le demandais.
J'espère.