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Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Los Caprichos [S] Mar 17 Fév - 12:16 | |
| Je ne sais pas trop pourquoi j'ai eu envie d'écrire ça tout d'un coup. C'est une sorte d'exercice plus qu'un vrai projet. Je veux obtenir une progression mais la difficulté va être de trouver le bon rythme. On verra bien où ça mène Sommaire :
Dernière édition par Meredith Epiolari le Sam 5 Déc - 22:23, édité 35 fois |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mar 17 Fév - 12:16 | |
| 1) Maman :
Le concept de sexualité infantile chez Freud c'est un truc bizarre. J'avoue ne pas avoir tout saisi. Surtout ce fameux stade phallique dans lequel l'enfant développerait un complexe d'Œdipe nécessaire à sa construction. Quand j'étais au collège, Madame Plantier l'avait traduit simplement par : « Tous les petits garçons tombent amoureux de leur mère et les filles de leur père tandis que l'autre parent est considéré comme un rival ». Ce raisonnement me semble un peu simpliste. Je ne pense pas que cet étrange phénomène se soit appliqué à moi. Sinon je me souviendrais d'elle. Je ne l'ai ni aimée ni haïe. Je ne sais même plus son prénom. Elle s'appelait Maman. Il y avait son odeur aussi. La respirer, c'était doux et rassurant, un peu comme de la lessive, de l'adoucissant peut-être ? Si j'avais pu garder un foulard ou un chemisier, peut-être que j'aurais retrouvé la mémoire. Je n'ai rien gardé d'elle. Je ne sais plus comment elle est partie, ni si c'était mon départ ou le sien qui a mis un un terme à notre relation. C'était une séparation lente mais pas douloureuse. Chaque fois que je me réveillais elle était un peu plus pâle, un peu plus floue, un peu moins là ; puis un jour elle a fini par disparaître complètement. Elle ne me manque pas. Je sais qu'elle n'approuverait pas la manière dont je vis. Elle n'a jamais approuvé beaucoup de choses. Avec elle, ma voix était toujours trop rauque, mon crayon trop souple et mes larmes trop salées. Elle avait des espoirs de mère et je les ai déçus. Ce n'était pas vraiment ma faute, ni la sienne. C'était un malheur, un concours de circonstances, on ne pouvait blâmer personne. Parfois il m'arrive de la comprendre, et puis non, on ne peut pas comprendre un mère, pas plus que l'on ne peut comprendre une inconnue. Je ne suis pas l'enfant dont elle rêvait. Je sais qu'elle en a eu d'autres après moi. Elle les a sûrement aimés plus que moi, mais je m'en moque. J'ai fini par effacer de ma mémoire celle qui devait être la première femme de ma vie.
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| | MidnightMaîtresse incontestée des vices infantiles Messages : 359 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 24 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 19 Fév - 18:11 | |
| Sache que je te lis, Rimi. Si je comprends ce que tu vas faire, ça va être cool Du coup je comprends ce que tu m'as dit sur les prénoms masculins/féminins mais... Milou ? *s'inquiète* Et... bah je veux la suite |
| | Messages : 340 Date d'inscription : 18/08/2014 Age : 25 Localisation : La tête sous l'oreiller
| Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 19 Fév - 19:27 | |
| Rha, je suis stupide, c'est de ça dont tu parlais D: (C'est la vieillesse, que veux-tu... Ma mémoire n'est plus c'qu'elle était ~) Eh, heu... (les prénoms ? Milou ? x) ) Les deux premières phrases ont un ton un peu... enfantin, le reste est plus froid, détaché, le perso se remémore sans s'impliquer dans ses souvenirs, avec des belles phrases ("Avec elle, ma voix était toujours trop rauque, mon crayon trop souple et mes larmes trop salées.", et puis "Je ne même sais plus son prénom. Elle s'appelait Maman." **), un fond intéressant, et... Et bref, le second capricho arrive quand ? |
| | La GrenouilleNatalie Sodomie, égérie Dior Messages : 125 Date d'inscription : 10/02/2015 Age : 33 Localisation : Dans un arbre | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 19 Fév - 20:57 | |
| Je trouve ce texte très beau est profond en terme d'émotions.
C'est finalement un sentiment qui est véritable pour beaucoup d'adultes. Notre mère on la voit de moins en moins puis un jour... C'est fini, on oublie de l'appeler, peu à peu on l'efface, on s'écarte, la visite devient la corvée comme quand on va voir la grand-mère qu'on a foutu en maison de retraite. On se croise à Noël, on se fait une bise, un cadeau choisi en catastrophe, on oublie qu'elle nous a porté, on oublie qu'on est issu de son corps... Juste on oublie notre origine. |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 19 Fév - 21:42 | |
| - Spoiler:
Merci tout le monde, on verra pour le rythme de post en fonction de ce que vous préférez Quant au deuxième capricho, il arrive tout de suite 2) Agathe :Agathe était un amour de récré qui ne signifiait rien. Le mot même d'amour paraît trop pompeux pour évoquer une relation si légère. Un peu comme l'image de ces deux gosses qui s'embrassent en étant certains qu'ils s'aiment, car enfin que savent-ils ces deux gosses des enjeux de l'amour ? Je ne savais pas non plus. Je n'avais pas encore de corps, je n'étais que de belles pensées. Elle me prenait par la main, elle m'embrassait sur la joue et je me débattais. C'était le temps où amoureux était un synonyme de pestiféré. Il m'arrive de le regretter. Jamais longtemps. Je ne pourrais pas la décrire. Elle non plus n'avait pas de corps, on ne regarde jamais les corps lorsque l'on a sept ans. C'est pour cela peut-être que nos bonshommes ont toujours un nez ou un bras en moins. A cet âge on pense à s'embrasser en se disant qu'ensuite on se transformera en Prince Charmant. Et puis on reste un crapaud toute sa vie, mais ce n'est pas bien grave, on s'habitue. Elle dessinait bien. Elle passait son temps à nous dessiner. On vivait dans un château ou sur une île. Elle voulait en faire son métier. Elle disait qu'un jour elle m'emmènerait sur cette place où les gens dessinent à Montmartre. C'est assez impressionnant quand j'y repense d'imaginer qu'une gamine de sept ans connaisse la Place du Tertre. Ce devait être une fille un peu précoce. J'avais sept ans moi aussi, je ne me rendais pas bien compte. Je me demande si elle avait conscience de nos corps. Cela ne m'étonnerait qu'à moitié. Son crayon était déjà bien assuré pour quelqu'un qui dessinerait en aveugle. Est-ce qu'elle dessine toujours ? Je voudrais bien savoir ce qu'elle est devenue. Je ne pense pas que je l'aimerais, mais ce serait intéressant de vérifier. Quand j'allais Place du Tertre, je pensais à elle. Je m'attardais sur un visage et je me demandais si je l'avais retrouvée. On finissait toujours par me regarder un peu bizarrement et jamais personne n'a proposé de me représenter dans un château ou sur une île.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 21:43, édité 4 fois |
| | LullabyConnasse Messages : 508 Date d'inscription : 28/07/2014 Age : 31 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Ven 20 Fév - 18:45 | |
| Je ne sais pas encore exactement ce que tu essayes de faire Rimi, mais pour l'instant j'aime bien ce que tu fais, c'est intéressant la façon dont tu reviens du manière froide, presque clinique sur le passé du personnage. Maintenant reste à savoir où ça va nous mener. Juste : - Rimi a écrit:
- enfin que savent-ils ces deux gosses des enjeux d'aimer ?
je trouve ça moche, j'aurais dit "les enjeux de l'amour" moi. |
| | MidnightMaîtresse incontestée des vices infantiles Messages : 359 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 24 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Ven 20 Fév - 19:26 | |
| Moi j'ai compris Et j'adore ta plume, si tu réussis ce que tu veux faire ça va être génial |
| | LullabyConnasse Messages : 508 Date d'inscription : 28/07/2014 Age : 31 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Ven 20 Fév - 19:38 | |
| Si t'aimes la plume de ta sœur, pique la lui voyons !
*fuit loin* |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Ven 20 Fév - 22:50 | |
| Je suis contente de l'effet que ça produit sur vous, j'avais peur que vous trouviez ça ennuyeux à vrai dire Je vais prendre un pari impossible : je dois faire 80 caprichos et si j'en poste un par semaine je m'engage sur plus d'un an. Donc je vais faire mieux que ça : si quelqu'un me demande un capricho, je m'engage à le lui fournir dans les 72 heures qui viennent Pour la phrase Lulla, je n'aime pas le mot "amour", c'est pourquoi j'essaye de le mettre le moins possible et j'ai écrit comme ça xD Mais je vais tout de même changer puisque ça doit mieux sonner quand même effectivement Oh et merci d'avoir pris le temps de commenter Ma plume est sous clé, désolée |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 26 Fév - 19:40 | |
| 3) Elena :
Elle avait un nom de famille russe que je n'ai pas retenu. Je me souviens juste d'avoir vu son portrait dans une galerie de peinture. C'était mon premier véritable amour, je crois. Elle m'avait fait forte impression avec son col haut et son chapeau à plumes noires. Mais son pouvoir de séduction résidait surtout dans le port de son menton légèrement hautain, adouci par des cheveux clairs et un regard doux. Dans ce regard, je lisais la bienveillante indifférence du tableau pour mes sentiments. C'est un peu le risque lorsque l'on choisi une peinture pour premier amour. D'aucuns trouveraient cela étrange, peu importe. Je n'ai partagé avec personne le secret de son existence, tout comme le développement de ces étranges sensations dans mon corps. Je possédais un secret et cela me donnait Toute Puissance. Je me sentais invincible lorsque je pensais à elle. Je venais la voir souvent. J'avais chaque fois un peu peur qu'elle ne soit plus là. Je me racontais des histoires : je pensais qu'elle était une reine désargentée que des ennemis poursuivaient et qu'elle devait se cacher là, dans cette galerie. Je l'aurais protégée jusqu'à la mort si ces ennemis étaient venus. En attendant, je la contemplais comme si ma vie en dépendait avec une fascination encore enfantine. Je rêvais de passer ma main dans ses cheveux. J'avais acquis une légère conscience du corps depuis Agathe : je voyais bien que la femme que je regardais était belle et j'avais envie de la toucher. Je devais sans cesse me souvenir qu'elle n'était qu'un mélange de couleurs sur une toile. Cela était à la fois frustrant et étonnamment agréable. J'avais en effet la certitude que cet amour inconventionnel qui ne me permettait pas d'aller au bout de mes désirs devait être plus beau que les autres pour cette raison précisément. De la beauté au bonheur, il n'y avait qu'un pas. Elena était belle, tout comme l'affection que je lui portais. Je n'avais pas besoin de davantage pour le moment. Je regardais, je rêvais et je croyais atteindre la plénitude. Et puis un jour, son portrait a été vendu et retiré de la galerie. J'ai tenté de me consoler en me disant que ça n'aurait jamais très bien marché entre nous de toute façon.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 21:42, édité 1 fois |
| | La GrenouilleNatalie Sodomie, égérie Dior Messages : 125 Date d'inscription : 10/02/2015 Age : 33 Localisation : Dans un arbre | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Dim 1 Mar - 9:55 | |
| J'aime vraiment ce défi que tu t'es lancé. En fait j'ai l'impression d'ouvrir une malle avec plein de petits morceaux de papiers sur lesquels tu as des histoires. C'est court mais ça suffit amplement pour s'attacher, pour comprendre, pour avoir une émotion. Ça se lit facilement, vite, ça fait une petite pause, une bulle. Merci beaucoup pour ces petits instants. |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 5 Mar - 21:31 | |
| Merci Aïvy 4) Kate :Je ne savais pas alors que toute ma vie je n'aimerais que de jolies peintures. Maman non plus, et c'était tant mieux car cela aurait sonné le glas de ses rêves de femme simple. Kate était aussi frustrante qu'un tableau mais beaucoup moins belle puisqu'elle était réelle. Elle signait ma découverte du corps, d'un corps réel fait de chair et de sang et non d’aplats de couleurs. Je l'ai rencontrée au collège, l'année où Madame Parmentier devait nous expliquer les mystères de l’œdipe. Une frasque adolescente délicieuse. Je la dévorais des yeux. Il me semble fou aujourd'hui d'imaginer qu'elle ne s'en soit pas rendu compte. Je n'avais pas tout à fait conscience qu'elle était capable de me voir. J'avais aimé trop de peintures et j'avais l'habitude de la froide indifférence de leurs yeux fixes. De fait, elle ne me voyait pas. Mon importance n'était sûrement pas suffisamment grande à ses yeux. C'était une jeune fille fragile et vive. Fière, surtout. Tout du moins, c'est ainsi que je me plaisais à la représenter mentalement. Elle avait le pas assuré et le sourire facile. C'était un bonheur que de la voir marcher. Bouger. Respirer. Je pouvais la contempler à chaque instant sous un point de vue différent avec la tranquille assurance qu'il me restait encore une infinité d'angles sous lesquels je ne l'avais pas vue. L'infini me paraissait merveilleux alors, parce que je ne pouvais encore comprendre ce qu'il signifiait. Pour l'heure, cela voulait simplement dire qu'elle était mille tableaux au lieu d'un seul et que la lumière, les vêtements qu'elle portait, la position qu'elle prenait m'offraient chaque fois une nouvelle jouissance. Je voulais la toucher elle aussi, vaguement. Passer ma main dans ses cheveux et respirer son odeur. Mais ce n'était qu'un fantasme et cela me paraissait aussi invraisemblable que de m'imaginer effleurer une toile. Mes désirs adolescents étaient encore sages. Avec le recul, je ne sais pas trop ce que je lui trouvais. Elle était d'une banalité effarante. Je crois que mon étrange fascination pour elle venait avant tout du fait qu'elle était une femme.
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| | Eilift Messages : 169 Date d'inscription : 01/09/2014 Age : 25 Localisation : Cloud of Unknowing
| Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 5 Mar - 22:04 | |
| C'est... *^* Ce contraste entre la femme et la peinture c'est juste trop cool de la mort qui donne la vie quoi /o/ (Pas constructif mais je dois aller me coucher /PAN/) |
| | La GrenouilleNatalie Sodomie, égérie Dior Messages : 125 Date d'inscription : 10/02/2015 Age : 33 Localisation : Dans un arbre | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 5 Mar - 22:26 | |
| Un texte magnifique, encore une fois savouré comme une petite friandise. J'adore, je prends mon temps pour déballer, je lis, relis encore une fois et puis... Je recommence.
Mais j'ai l'esprit trop perverti, trop d'idées cochonnes que je ne maitrise pas et c'est juste DEMONIAQUE ! (En gros elle est chaude comme une baraque à frites mais elle assume pas).
J'aimerais tellement pouvoir faire du constructif mais là... Juste j'ai envie de me poser et de déballer encore et encore cette friandise pour la savourer, la déguster. |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 11 Mar - 7:32 | |
| Oh Lu, tu me lis aussi, merci *.* Merci Aïvy, laisse un peu de temps à mon personnage avant de sauter sur tout ce qui bouge ! xD
5) Daphné :
Je la croisais parfois entre deux cours. Elle me plaisait, mais je ne pouvais pas le lui dire. Je savais qu'elle ne m'aimait pas, elle me l'a dit en sourire. Il n'y avait pas dans ses prunelles l'étincelle qui trahit l'amour, seulement l'affection bienveillante d'une rencontre de couloir. Ce n'était pas grave, je pouvais me contenter de cette affection : c'était la première fois qu'une femme reconnaissait mon existence et cela me semblait déjà un trésor à la valeur inestimable. Mes yeux la cherchaient constamment sans que je ne puisse les en empêcher. De temps à autre, son regard croisait le mien. Alors elle se mettait à sourire. Un sourire vrai, franc, sincère, un sourire heureux et surpris de me trouver ici, un sourire qui faisait briller les yeux et chanter le cœur. Je découvrais que les femmes n'étaient pas uniquement de belles peintures et qu'elles savaient elles aussi regarder. J'apprenais la douceur que dissimulait leur froideur hautaine, je percevais enfin une faille, une sensibilité fragile dans leur beauté. Elle me prouvait qu'il y avait quelque chose au-delà de leur indifférence, un peu d'espoir peut-être, pas beaucoup mais de l'espoir tout de même. Nous gardions ce contact visuel aussi longtemps que notre audace nous le permettait, puis nous détournions ensemble nos visages lorsque nous prenions conscience de l'étrangeté de ces instants. Je me demande un peu ce qu'elle devait penser de moi. Chaque fois qu'elle me surprenait à la regarder, elle me décochait ce même sourire avec la même bienveillance comme si cela était naturel. Nous ne parlions pas. Jamais. Il y avait dans nos regards plus de mots que nos bouches n'auraient pu en prononcer, plus de mots que n'en contenaient toutes les vérités du monde. Puis un jour, j'ai trouvé ses yeux pleins d'adieux et de promesses. J'ai compris que c'était la dernière fois, alors je l'ai fixée jusqu'à ce qu'elle disparaisse avec sa valise rouge. Daphné s'en allait et elle ne laissait derrière elle qu'une douce odeur de laurier rose.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 21:45, édité 2 fois |
| | La GrenouilleNatalie Sodomie, égérie Dior Messages : 125 Date d'inscription : 10/02/2015 Age : 33 Localisation : Dans un arbre | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 11 Mar - 18:01 | |
| Comme toujours, je savoure ma petite friandise... Ce qui me fait sourire c'est que la façon dont tu décris cette relation, ça a l'air destructeur... Tu sais quelques chose qui le bouffe un peu doucement mais surement et la saligote a un parfum de LAURIER ROSE, juste une des pire plantes niveau toxicité. |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 18 Mar - 13:41 | |
| Merci Aïvy J'ignorais que le laurier rose était toxique, je me référais juste au mythe d'Apollon et Daphné mais effectivement ça correspond bien à mon personnage et je suis super heureuse que tu sentes déjà ce côté destructeur qui est mon fil conducteur 6) Carmen :Madame Plantier, qui décidément était très bavarde, nous avait un jour expliqué que tout ce que l'on faisait avec amour était bien fait. Sur le moment, j'avais ri de cette expression toute faite. Mais quelques années plus tard, quand j'ai rencontré Carmen, j'ai compris qu'il y avait du vrai là-dedans. Elle était un défi permanent. Dès que j'avais l'occasion de lui adresser quelques mots, mon esprit se déliait et se trouvait armé d'une éloquence nouvelle. Ma maladresse disparaissait et moi qui n'avais jamais été drôle, je la faisais rire. Tout devenait prétexte pour lui plaire, pour rivaliser d'intelligence afin de la voir dévoiler ses dents enchanteresses. Je parlais et j'entendais son rire fleurir dans la nuit comme la plus belle des récompenses. Devant elle, parler devenait un art, et j'y excellais puisque je l'aimais. Je passais des heures à préparer mes effets. Je partais dans de grands discours passionnés, je trouvais la pointe assassine et le jeu de mots qu'il fallait. Lorsqu'elle était entourée, je devais me retenir de la fixer pour guetter ses réactions. J'avais à ces instants l'impression qu'elle savait d'instinct que tous mes traits d'esprit lui étaient dédiés. Elle riait. J'accueillais modestement son rire avec un brin de surprise extasiée. Je n'entendais que lui. Je me demande aujourd'hui si c'est parce qu'elle était seule à me trouver drôle ou si je ne faisais pas attention au reste. Ses yeux brillaient et elle me félicitait. J'exultais en silence, ne cherchant pas à obtenir davantage d'elle que ces quelques mots qui montraient que je n'étais pas invisible à ses yeux et que je pouvais lui plaire. Puis je l'ai vue avec un Autre et j'ai compris qu'il ne suffisait pas de faire rire une fille pour qu'elle nous aime.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 21:46, édité 2 fois |
| | LullabyConnasse Messages : 508 Date d'inscription : 28/07/2014 Age : 31 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Lun 23 Mar - 14:32 | |
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| | Dystopies ElliptiquesBaleine Impériale Messages : 276 Date d'inscription : 06/08/2014 Localisation : sur son piano
| Sujet: Re: Los Caprichos [S] Lun 23 Mar - 18:40 | |
| Haha, tu peux pas savoir à quel point c'est perturbant de lire "Daphné". Donc, comme tu ne peux pas refuser les réclamations, je témoigne de mon adhésion comme je peux : le prochain Caprichos ! le prochain ! |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 25 Mar - 23:01 | |
| Le beau sexe :') Merci Lulla Oh, Dys, tu me lis ? Merci à toi, en quoi était-ce perturbant de lire Daphné ? Je veux dire... je sais que c'est le prénom de Nyxouille mais ce n'était pas Nyxouile et en plus pour trouver autant de prénoms féminins, si le vôtre ou un de ses dérivés n'est pas dans la liste c'est que je ne l'aime pas un miracle. 7) Eurydice :J'avais la certitude que si je la regardais trop longtemps, je la perdrais pour toujours et que si je ne le faisais pas je réaliserais que j'avais rêvé son existence. Eurydice me faisait ainsi osciller entre les Enfers et les Cieux, mettant à mal mon beau lyrisme prétentieux. Je l'ai connue en même temps que Carmen. Je me souviens vaguement des premières images de notre rencontre, des premières images de cette fille qui habiterait mon esprit pour quelques temps. Je n'avais à ces instants aucune idée de ce qu'elle deviendrait pour moi. Il me semble même que je l'ai oubliée sitôt remarquée. Une autre fille m'occupait déjà et je ne voyais plus rien. A partir de quel moment ai-je pris conscience de sa présence ? A partir de quel moment ai-je commencé à me remémorer l'image de cette fille que je semblais devoir oublier au profit d'une autre, cette fille que je ne pouvais plus regarder sous peine de me trahir ? Je ne parvenais pas à fixer de limites précises, à comprendre là où s'était effacé le charme de Carmen et où avait commencé cette nouvelle obsession. Mon premier souvenir d’elle était un gâteau aux amandes qu’elle avait préparé et dont la saveur était restée dans ma mémoire. Les premiers souvenirs sont parfois idiots. Elle m'intimidait. Je perdrais ma verve en sa présence, tâchant de garder ma concentration sur la conversation en cours mais l'esprit déjà déchiqueté par un Cerbère amoureux. Je n'osais plus poser les yeux sur elle de peur de croiser les siens, si noirs, si noirs... Elle était la femme que l'on ne devait pas regarder. Si je le faisais, elle me découvrirait, elle comprendrait tout, elle me haïrait. Je le savais depuis le début mais mon amour pour les belles peintures était trop fort. Elle avait un petit point au-dessus du sourcil gauche qui m'attirait irrésistiblement. Je mourais d'envie de l'observer afin d'apprendre par cœur l'emplacement de ce petit point, les traits de son visage et le grain de sa peau. Je rêvais de peindre son visage pour en garder une trace. Il fallait que je la regarde, que je sache qu’elle était toujours en vie, en mouvement, qu’elle portait un chemisier bleu ou une veste noire. Je n’ai pas tenu. Plus tard, mes yeux sont devenus rouges comme si j'avais trop longtemps fixé le soleil. Je n'ai jamais su peindre correctement.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 21:49, édité 1 fois |
| | MidnightMaîtresse incontestée des vices infantiles Messages : 359 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 24 | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Ven 27 Mar - 9:54 | |
| Je trouve la dernière phrase de Carmen un peu... Je ne sais pas mais je l'aime moins ^^ Sinon c'est toujours aussi bien |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 1 Avr - 22:42 | |
| Moi aussi je l'aime moins, je reviendrai sûrement dessus mais en même temps mon personnage a besoin de cette rupture brutale 8 ) Amandine : Elle me faisait penser à une petite fille. Elle répétait sans arrêt qu'elle ne voulait pas tomber amoureuse sur le même ton qu'emploient les enfants qui protestent parce qu'ils n'ont pas envie de grandir. Elle était si mignonne en disant cela que j'avais envie de lui promettre que cela n'arriverait pas si telle était sa volonté. Je ne lui mentais pas tout à fait puisque, déjà, j'avais la certitude qu'elle ne m'aimerait jamais. Pourtant, cela ne me rendait pas triste. Je trouvais en elle quelque chose de bien plus beau que le bonheur. Elle avait l'énergie intarissable des enfants et je me sentais un parfois un peu gauche à ses côtés, d'autant qu'il lui plaisait de se moquer de moi. Elle ne marchait qu'en dansant, ne parlait qu'en riant, ne regardait qu'en brillant. C’était une révolutionnaire, elle embrassait toutes les causes qui lui paraissaient justes, se réclamait des auteurs les plus utopistes et se battait contre les moulins avec une ardeur toujours plus forte. Elle incarnait la figure de la douce rêveuse pour qui la révolte est une passion. On lui disait souvent qu’elle devait se montrer plus raisonnable, qu’elle n’avait pas assez d’expérience pour juger, qu’avec le temps elle comprendrait qu’on ne pouvait pas changer le monde. Je l’observais avec tendresse se récrier : A quoi servent les idéaux si l’on ne peut pas changer le monde ?Un Autre la séduirait-il un jour ? Je ne l'imaginais qu'avec un Prince Charmant. Je me demandais vaguement comment pouvait grandir une telle créature, si elle finirait par renoncer à ses principes pour d'autres que le commun des mortels jugeait plus sages, ou si elle resterait éternellement la petite Amandine que j'avais aimée. Il semble que je ne l'ai pas vue vieillir. Tant mieux. Je ne voulais emporter avec moi que cette impression juvénile douce comme un baiser sur la joue.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 22:07, édité 2 fois |
| | Messages : 340 Date d'inscription : 18/08/2014 Age : 25 Localisation : La tête sous l'oreiller
| Sujet: Re: Los Caprichos [S] Jeu 2 Avr - 1:59 | |
| "Plus tard, mes yeux sont devenus rouges comme si j'avais trop longtemps fixé le soleil." Tous les sens possibles de cette phrase ** (Et... Eurydice ? x) D'ailleurs, c'est un sous-marin de classe Daphné, tutélié o/ //PAN/) |
| | Meredith EpiolariReine de l'Impro Messages : 1431 Date d'inscription : 29/07/2014 Age : 26 Localisation : Between the peanuts and the cage | Sujet: Re: Los Caprichos [S] Mer 8 Avr - 22:32 | |
| Quoi Eurydice, tu n'aimes pas ce prénom ? Eurydice c'est celle qu'on ne peut pas regarder, comme pour le mythe Orphée ~ Merci Kawy 9) Juliette :Je l'ai rencontrée en allant voir une pièce de Shakespeare. C'est pour cette raison que je l'ai baptisée Juliette. Je crois qu'elle était blonde, ce n'était pas évident dans la semi-obscurité. Il y avait des places libres un peu partout et pourtant elle s'est installée à côté de moi. Ça ne signifiait rien, bien-entendu. Mais elle était mignonne et j'avais des amours tragiques plein la tête. Je n'osais pas la regarder. Souvenir d'Eurydice, probablement. J'avais compris qu'il existait des codes qui interdisaient de fixer trop longtemps la même personne et je les trouvais absurdes. La pièce a commencé. J'avais les yeux rivés sur la scène, mais mes oreilles étaient toutes tendues vers ses sourires, vers ses soupirs, vers elle, enfin. Je pensais si fort à elle que j'ai cru qu'elle allait m'entendre. En contrebas, les acteurs me paraissaient piètres puisqu'ils n'étaient pas elle. Le seul spectacle sur lequel je voulais porter mon attention était celui que je ne pouvais pas regarder. Je devais profiter de chaque seconde à ses côtés car d'ici quelques heures, je ne la reverrais plus. Mon corps était tout juste contrôlable et si j'avais cédé à la tentation, j'aurais cherché à prendre sa main et à lui dire, lui dire... La pièce s'est terminée, nous avons applaudi. Elle aurait peut-être compris après tout. Peut-être pas. J'avais les larmes aux yeux sans comprendre pourquoi. Trop, c'était trop. Cette fille, Shakespeare, la lumière, l'odeur du théâtre et le sourire des cadavres ressuscités sur scène... Ma sensibilité exacerbée souffrait le martyr et savait que le pire restait à venir. Moi, je continuais à applaudir, songeant que nous étions dans un accord mystique qui nous permettait d'entrechoquer nos mains au même rythme. J'aurais tout donné pour ces deux minutes d'unité. Puis les applaudissements ont cessé. La foule me portait déjà vers la sortie, tandis qu'elle restait en arrière. Je me dévissais le cou pour l'apercevoir. Je n'ai pas réussi. Je n'ai même pas pu lui dire adieu avec les yeux. Je n'avais pas de dernière image à emporter avec moi. Je n'avais qu'un prénom qui n'était pas le sien et une tragédie shakespearienne. En sortant du théâtre, j'ai entendu dans ma tête l'écho des cris de Roméo qui mourait sur le cadavre de sa dulcinée par la faute de convenances stupides.
Dernière édition par Meredith Epiolari le Mer 29 Juil - 22:09, édité 3 fois |
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