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Aujourd'hui, un addendum à Marie-Odile o/ Qu'entends-je par ce terme ? Simplement un petit texte qui est lié à Marie-Odile, en reprend l'univers, et peut se placer à peu près à l'endroit où je suis rendu dans la rédaction du roman.
C'est aussi une façon pour moi d'éclaircir certaines parties de certains personnages, mais sans avoir à me plier aux règles d'écriture que je m'impose lorsque je m'occupe de Marie-Odile, le vrai.
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M&M
Addendum à Marie-Odile
Je les ai croisées, hier. Elles étaient belles ; moins que dans mes souvenirs, mais je préfère considérer que c'est dû à la capacité sélective de ma mémoire. Il est amusant de constater que je n'en ai jamais vu une sans que l'autre ne soit dans les parages. Il est également amusant de voir que, dès leur prénom, les deux jumelles sont liées : M***** et M*****, à l'image, bien que je préfère ne pas considérer ce constat plus que de raison, de ces deux dignes représentantes de leur famille politique – un terme qui n'avait, chez nous, jamais réellement pris son sens avant leur lignée. Dans les rues désertes car nocturnes de cette petite ville du bord de Loire, seuls les lampadaires éclairaient mes pas, et seuls ceux-ci, de même, se dressaient encore fièrement. J'étais, pour ma part et selon mes souvenirs, à demi avachi, éméché comme un diable, et je me traînais doucement, avec force démonstration musculaire, jusqu'à un lit m'attendant, là-bas, au loin – un loin vague que mes yeux semblaient avoir déjà atteint, par ailleurs. C'est là qu'elles firent irruption, remontant de l'esplanade menant aux quais. Main dans la main, unies par une écharpe solidement nouée, elles marchaient doucement, nullement inquiétées par l'atmosphère glauque si particulière aux nuits ligériennes. Les voyant, je m'assis lourdement sur le bas-côté, m'allongeant un instant puis reprenant quelque peu mes esprits et tentant d'afficher un sourire agréable et de respirer par le nez pour éviter d'envahir l'air environnant des abondants relents d'alcool dont j'étais le gardien. Lorsqu'elles passèrent devant moi, M***** tourna la tête et me sourit, ralentissant. Mais sa sœur ne semblait pas du même avis, et elle poursuivit son chemin, accélérant même, subrepticement, la cadence. La première chuchota ses doléances à la jumelle dominante, qui finalement fit demi-tour et vint, toujours accompagnée, me saluer d'une hauteur que je ne pouvais, assis en tailleur, pas évaluer parfaitement.
« Salut, Ririx », articula M*****.
« Salut, Ririx », confirma M*****.
« Bonsoir, mesdemoiselles. Que le ciel et ses filles pour toujours vous gardent », tentai-je de prononcer. « Sachez que par ici, sur ces terres, l'on me nomme Otto. »
« Otto ? C'est moche. »
« Moi j'aime bien. »
« Quoi qu'il en soit, mesdemoiselles, c'est un plaisir que de vous revoir. Que faites-vous donc par ici, si loin de votre chez-vous central ? »
« Alors en fait, c'est une longue histoire. On nous a dit que nous avions de la famille par ici, et du coup… »
« Famille. Nous restons pour la semaine puis retournons dans notre… chez-nous », coupa M*****.
« Je vois, je vois ; et j'entends bien. Étiez-vous donc conscientes de ma présence dans ce morceau de France ? » balbutiai-je avant de reprendre : « Ah, la France… elle me manquerait bien, si je n'étais pas français. C'est drôle, la vie, parce que des fois… »
« Je n'étais pas au courant, sans quoi je ne serai sûrement pas venue » m'interrompit M*****.
« Moi je m'en étais doutée, et donc j'ai fait des recherches et j'en étais consciente, mais je n'espérais pas te croiser, d'autant plus à cette heure ! »
« Je vois, je vois ; et j'entends bien. Vous me permettrez de poser cette si fade mais parfois intéressante question : quoi de neuf ? »
« Je suis, comme je te l'avais promis, première de ma promotion dans le meilleur lycée de France. »
« Oh, j'en suis tout heureux ! Promis, promis… c'est beau, les promesses, vous ne trouvez-pas ? »
Les deux eurent un regard gêné, puis M***** reprit la parole :
« Quand elles sont tenues, oui, tout à fait. »
Et sur ces mots s'en fut. M*****, essuyant une larme au coin de son œil droit, m'adressa un dernier regard contrit avant de s'en aller rejoindre sa jumelle au pas de course. En s'éloignant, elle jeta un dernier regard vers moi, à travers ses cheveux – visiblement naturellement devenus bruns depuis notre dernière rencontre –, qui s'accompagna d'un petit signe de main et d'un sourire timide. Dans la brume matinale commençant à s'élever des fondations du monde diurne, les jumelles, l'une brune, l'autre brune, bras-dessus bras-dessous, disparurent ; et je souris en me souvenant que leur dernier départ s'était fait de la même façon, là-bas, sous la cathédrale.